Sermon 58 ; PL 57, 363 (trad. coll. Icthus, t. 10, p. 259 rev.)

Nous, tous les chrétiens, sommes le corps du Christ et ses membres, dit l’apôtre Paul (1Co 12,27). A la résurrection du Christ, tous ses membres ont ressuscité avec lui, et tandis qu’il passait des enfers à la terre, il nous fait passer de la mort à la vie. Le mot « pâque » en hébreu veut dire passage ou part.

Ce mystère n’est-il pas le passage du mal au bien ? Et quel passage ! Du péché à la justice, du vice à la vertu, de la vieillesse à l’enfance. Je parle ici de l’enfance qui tient à la simplicité, non à l’âge. Car les vertus, elles aussi, ont leurs âges.

Hier la crépitude du péché nous mettait sur notre clin. Mais la résurrection du Christ nous fait renaître dans l’innocence des tout-petits. La simplicité chrétienne fait sienne l’enfance. L’enfant est sans rancœur, il ne connaît pas la fraude, il n’ose pas frapper. Ainsi, cet enfant qu’est le chrétien ne s’emporte pas si on l’insulte, il ne se fend pas si on le pouille, il ne rend pas les coups si on le frappe. Le Seigneur exige même qu’il prie pour ses ennemis, qu’il abandonne tunique et manteau aux voleurs, et qu’il présente l’autre joue à ceux qui le giflent (Mt 5,39s). L’enfance du Christ passe l’enfance des hommes…

Celle-ci doit son innocence à sa faiblesse, celle-là à sa vertu. Et elle est digne de plus d’éloges encore : sa haine du mal émane de sa volonté, non de son impuissance.